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Comprendre le décret sur l’agrivoltaïsme en 5 étapes

- jeudi, Avr 25 -

Le 8 avril 2024, le décret relatif au développement de l’agrivoltaïsme et aux conditions d’implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers a été publié. Mais alors qu’indique le décret ? 

Le décret du 8 avril s’ajoute à d’autres textes parus récemment, à savoir en particulier : 

  • Le Décret n°2023-1245 du 22 décembre 2023 sur les comités de projet ;
  • Le Décret n°2023-1408 du 29 décembre 2023 définissant les modalités de prise en compte des installations de production d’énergie photovoltaïque au sol dans le calcul de la consommation d’espace (et son arrêté associé du même jour).

barre verticale  Étape 1 : Les caractéristiques propres à l’agrivoltaïsme

Le caractère agricole des parcelles, les exploitants et les services apportés

  • Le caractère agricole des parcelles : le périmètre est défini par les limites physiques nécessaires pour implanter de manière harmonieuse et continue les panneaux photovoltaïques. Il peut différer en superficie de celle déclarée au cadastre ou dans d’autres documents officiels.
  • Les exploitants : un agriculteur actif est défini comme toute personne physique ou morale répondant aux conditions définies dans le code rural et de la pêche maritime. En cas de changement, l’exploitation de l’installation agrisolaire peut se poursuivre pendant un maximum de 8 mois sans agriculteur actif. 
  • Les services apportés : le décret spécifie que l’installation agrivoltaïque doit permettre d’améliorer le potentiel et l’impact agronomiques (incluant l’amélioration des qualités agronomiques du sol ainsi que l’augmentation du rendement de la production agricole, ou du moins la réduction de la baisse tendancielle du rendement observée localement). Mais aussi, s’adapter au changement climatique, en limitant les effets néfastes du changement climatique (ex : limitation du stress hydrique). Les modules doivent également protéger contre les aléas météorologiques qui menacent la quantité ou la qualité de la production agricole. Et enfin, améliorer le bien-être animal, en contribuant au confort thermique des animaux notamment en réduisant les températures (sous les panneaux photovoltaïques). 

Les conditions du décret visent à garantir que les installations agrivoltaïques respectent les normes agricoles et contribuent à l’amélioration de la durabilité et de la résilience des exploitations agricoles.

La production agricole et le revenu issu de cette production

  • Une production agricole significative : pour les installations agrivoltaïques (hors élevage), la production agricole est considérée comme significative si le rendement par hectare observé sur la parcelle où est située le projet est supérieur à 90% de celui observé sur une zone témoin. Cette zone témoin est une parcelle répondant à des critères spécifiques, notamment une superficie minimale, une proximité géographique, des conditions pédo-climatiques similaires et une culture similaire à celle de la parcelle avec l’installation agrivoltaïque. La cohérence entre les résultats agronomiques et la parcelle  agrivoltaïque est régulièrement vérifiée par l’exploitant. 
  • Des dérogations spécifiques : il peut-être dérogé à l’obligation de se référer à la zone témoin dans certaines conditions, notamment si le taux de couverture de l’installation est inférieur à 40% et que l’exploitant ne peut créer une zone témoin technique. Cette dérogation peut également être accordée si une installation agrivoltaïque similaire avec une zone témoin existe au niveau départemental ou régional. De plus, certaines technologies agrivoltaïques éprouvées peuvent être exemptées de cette obligation, avec des critères spécifiques d’inscription sur une liste établie par un arrêté ministériel.
  • Un revenu issu de la production agricole : le revenu issu de la production agricole est considéré comme durable si la moyenne des revenus issus de la vente des productions végétales et animales après l’implantation de l’installation agrivoltaïque n’est pas inférieure à celle avant l’implantation, en tenant compte de l’évolution économique générale et des modalités définies par arrêté. Une diminution plus importante peut être acceptée en cas d’événements imprévisibles et sur demande justifiée. Pour les nouveaux agriculteurs, le revenu est évalué par comparaison avec d’autres exploitations similaires localement.

Ces mesures visent à assurer que les installations agrivoltaïques respectent les normes agricoles et contribuent de manière durable à l’économie agricole locale. 

Les conditions relatives à l’activité

  • Garantie de l’activité principale : pour garantir que la production agricole reste l’activité principale, une installation agrivoltaïque doit respecter deux conditions. Tout d’abord, la superficie non exploitable en raison de l’installation agrivoltaïque ne doit pas dépasser 10% de la superficie totale couverte par celle-ci. En second, la hauteur et l’espacement des panneaux photovoltaïques doivent permettre une exploitation normale du terrain, assurer la circulation, la sécurité physique, et fournir un abri aux animaux.  Si les parcelles sont mécanisables, l’installation doit permettre le passage des engins agricoles.
  • Le taux de couverture : le taux de couverture d’une installation agrivoltaïque est défini comme le rapport entre la surface maximale projetée au sol des panneaux photovoltaïques et la surface totale de la parcelle agricole où est situé le projet agrisolaire. Un arrêté ministériel fixe la valeur maximale de ce taux de couverture pour chaque type de technologie éprouvée, garantissant ainsi que la production agricole demeure l’activité principale de la parcelle. 
  • L’exception : pour les installations de plus de 10 MW qui ne sont pas régies par un arrêté spécifique, le taux de couverture ne doit pas dépasser 40%.

Ces mesures visent à assurer que les installations agrivoltaïques n’impactent pas de manière excessive les terres agricoles et préservent leur utilisation principale pour l’agriculture, tout en permettant une exploitation normale et sécurisée des parcelles.

barre verticale   Étape n°2 : les dispositions spécifiques aux installations photovoltaïques compatibles avec l’exercice d’une activité agricole.

Conception d’un document cadre

  • Définition du sol inculte : un sol est considéré comme inculte s’il répond à l’une des conditions suivantes. La première, l’exploitation agricole ou pastorale y est impossible en raison de ses caractéristiques topographiques, pédologiques et climatiques, ou suite à une décision administrative. La deuxième, il ne correspond à aucune catégorie de forêts définies par arrêté ministériel comme présentant des enjeux importants de stockage de carbone, de production sylvicole, ou d’enjeux patrimoniaux en termes de biodiversité et de paysage.
  • Durée minimale du document : 10 ans.
  • Critères d’inclusion : certaines surfaces sont incluses dans le document cadre si elles répondent à des critères spécifiques. Être situées en zone agricole, non exploitées et à moins de 100 m d’un bâtiment d’une exploitation agricole. Être des sites pollués, des friches industrielles, des anciennes carrières, des terrains dégradés par l’activité minière, etc. Être situées dans les zones spécifiquement délimitées dans le plan local d’urbanisme (PLU) comme favorables à l’implantation de panneaux photovoltaïques.
  • Exclusions : certaines zones sont exclues du document cadre, notamment les zones agricoles protégées, les zones de protection naturelle, agricole et forestière, etc.
  • Identification des surfaces : les surfaces définies dans le document cadre sont identifiées à l’échelle des parcelles cadastrales, sauf exceptions spécifiées. 
  • Consultation et révision : le document cadre est soumis pour avis aux représentants des organisations professionnelles agricoles des professionnels des énergies renouvelables, des collectivités concernées, et à la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Il est révisé au moins tous les 5 ans.

Ces mesures visent à encadrer l’implantation d’installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers tout en tenant compte des enjeux environnementaux et agricoles locaux.

Comprendre le décret sur l’agrivoltaïsme en 5 étapes

barre verticale   Étape n°3 : régime des autorisations d’urbanisme relatives aux projets d’ouvrages de production d’électricité à partir de l’énergie solaire sur les espaces naturels, agricoles et forestiers.

Les dispositions du code de l’urbanisme en ce qui concerne les installations, ouvrages et constructions agrivoltaïques, ainsi que d’autres installations liées à l’agriculture et à l’énergie (article 3).

  • Un nouvel alinéa est ajouté pour inclure les installations, ouvrages et constructions présentés comme agrivoltaïques, conformément à l’article L.314-36 du code de l’énergie.
  • L’article R. *422-2-1 est modifié pour exclure les constructions prévues dans le nouvel alinéa ajouté à l’article R. * 422-2
  • Un nouvel article R.423_70-2 est ajouté, spécifiant un délai de deux mois pour l’émission d’un avis favorable par la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers pour les demandes de permis ou de déclaration préalable concernant certaines installations ou ouvrages liés à l’agriculture et l’énergie. 
  • L’article R.431-27 est rétabli avec des dispositions spécifiques concernant les demandes d’autorisation d’urbanisme pour différents types d’installations, ouvrages ou constructions, y compris les agrivoltaïques. Ce nouvel article précise les documents requis pour justifier le respect des critères et conditions prévus par la loi. 
  • Une modification est apportée à l’article R.*431-36 pour inclure la nécessité de compléter le dossier joint à la déclaration préalable pour certaines installations spécifiées avec les documents mentionnés dans l’article R.431-27, ainsi que d’autres éléments requis par la loi.

Ces modifications visent à encadrer et réguler les installations agrivoltaïques ainsi que d’autres installations liées à l’agriculture et à l’énergie en clarifiant les exigences et les documents nécessaires pour les demandes d’autorisation d’urbanisme.

Une nouvelle sous-section qui traite de la durée d’autorisation, du démantèlement et de la remise en état des installations après exploitation (article 4).

  • Durée d’autorisation : 40 ans (articles L. 111-27 & L. 11-29). Peut-être prolongé de 10 ans supplémentaires si l’installation est encore productive, sous certaines conditions et après mise à jour des garanties financières.
  • Démantèlement et remise en état : les opérations de démantèlement et de remise en état après exploitation comprennent diverses actions telles que le démantèlement des installations, la remise en état des terrains et la gestion des déchets. Ces opérations doivent être effectuées dans un délai d’1 an après la fin de l’exploitation (dans certains cas prolongé jusqu’à 3 ans). 
  • Garanties financières : l’autorité compétente peut exiger du bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme la constitution de garanties financières pour couvrir les coûts de démantèlement et de remise en état en cas de défaillance. Le montant de ces garanties est fixé par l’arrêté d’autorisation d’urbanisme, et il est basé sur un barème forfaitaire déterminé par les ministres de l’agriculture et de l’énergie. Les garanties financières sont consignées auprès de la Caisse des dépôts et consignations et peuvent être levées en tout ou en partie lorsque les travaux de remise en état sont achevés. 

En résumé, cette nouvelle sous-section vise à encadrer la durée d’autorisation des installations, ainsi qu’à établir des règles claires concernant leur démantèlement et leur remise en état après exploitation, tout en assurant une couverture financière adéquate pour ces opérations.

Les modalités techniques mentionnées dans l’article L. 111-30 du code de l’urbanisme sont définies par le décret pris en application du 6° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021. Cette loi vise à lutter contre le dérèglement climatique et à renforcer la résilience face à ses effets.

barre verticale   Étape n°4 : contrôles et sanctions.

Les modalités de suivi et de contrôle des installations agrivoltaïques et des zones témoins associées.

  • Contrôle préalable à la mise en service : avant la mise en service de l’installation et éventuellement de la zone témoin associée le projet doit subir un contrôle pour vérifier le respect des dispositions techniques définies par la loi. Ce contrôle est effectué par des organismes spécifiques mentionnés dans l’article, tels que des organismes scientifiques, des instituts techniques agricoles, des chambres d’agriculture, etc. L’exploitant de l’installation doit transmettre le rapport de contrôle à l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme. Le défaut de transmission du rapport ou de respect des dispositions techniques entraîne des sanctions. 
  • Suivi annuel : l’exploitant de l’installation doit transmettre annuellement des informations sur la production énergétique et agricole de la parcelle à l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). 
  • Travaux de démantèlement et de remise en état : ils doivent être effectués conformément aux dispositions légales, un rapport technique doit être réalisé et transmis à l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme. 
  • Mise en demeure et travaux d’office : en cas de non-respect des obligations de démantèlement et de remise en l’état, l’autorité compétente peut mettre en demeure la personne concernée. Si la mise en demeure n’est pas suivie d’effet, l’autorité compétente peut procéder d’office aux travaux nécessaires, en faisant supporter au propriétaire du terrain les coûts éventuels. 
  • Transmission des rapports à l’ADEME : les rapports doivent être transmis pour application des dispositions légales en matière d’environnement. 

En résumé, cette nouvelle sous-section établit un cadre réglementaire pour le suivi, le contrôle et le démantèlement des installations agrivoltaïques, avec des procédures claires en cas de non-respect des obligations

Modalités de suivi et de contrôle pour l’agrivoltaïsme

  • Contrôle préalable à la mise en service : avant leur mise en service, les installations photovoltaïques doivent subir un contrôle. 6 ans après leur achèvement, elles sont soumises à un nouveau contrôle pour s’assurer du respect des dispositions légales, notamment en ce qui concerne les fonctions écologiques du sol et son potentiel agronomique (contrôle réalisé par la chambre d’agriculture par exemple). 
  • Mise en conformité et démantèlement : si le rapport de contrôle révèle que les installations ne respectent pas les conditions de compatibilité avec l’activité agricole, l’autorité compétente en matière d’urbanisme peut mettre en demeure l’exploitant de se conformer à ces exigences dans un délai donné, ne pouvant excéder 6 mois. En cas de non-respect, le démantèlement de l’installation peut être prescrit.  
  • Travaux de démantèlement et de remise en état du site : les travaux de démantèlement et de remise en état du site doivent être effectués conformément aux dispositions légales. En cas de non-respect de ces obligations, l’autorité compétente peut mettre en demeure la personne concernée de se conformer dans un délai déterminé. Si aucune action n’est entreprise, les travaux de mise aux normes peuvent débuter et les coûts sont supportés par le propriétaire. 
  • Contrôle des installations non exploitées ou non conformes : mise en demeure de l’exploitant en cas de non-respect et prescription du démantèlement de l’installation. 

barre verticale   Étape n°5 : dispositions transitoires et finales.

Les domaines et les délais d’application du décret en question

Domaines d’application :

  • Il s’applique aux installations agrivoltaïques dont la demande de permis ou la déclaration préalable est soumise à partir d’1 mois après la publication du décret.
  • Il concerne également les installations photovoltaïques situées sur des terrains à vocation agricole, pastorale ou forestière régies par l’article L. 111-29 du code de l’urbanisme, à condition que la demande de permis ou la déclaration préalable soit déposée à partir d’un mois après la publication du document-cadre départemental mentionné au même article L. 111-29.

Délai pour les chambres départementales d’agriculture :

  • Les chambres départementales d’agriculture disposent d’un délai de 9 mois à partir de la publication du décret pour transmettre leur proposition de document-cadre au représentant de l’État dans le département, conformément au deuxième alinéa de l’article L. 111-29 du code de l’urbanisme.

barre verticale   Pour aller plus loin

Le régime juridique relatif à l’agrivoltaïsme n’est cependant pas encore achevé. En effet, des textes supplémentaires sont attendus sur différentes thématiques :  

  • Arrêté agrivoltaïque précisant les dispositions du décret du 8 avril 2024 et notamment les modalités de calcul des garanties financières et de suivi en phase d’exploitation. 
  • Arrêté sur les technologies éprouvées.
  • Arrêté sur la mise en œuvre de l’activité agricole significative / dispositions législatives de cadrage entre exploitants, propriétaires et producteur d’électricité.

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